Nous avons mis trois semaines
à fixer une date qui accommodait suffisamment d’oenopotes pour tenir la dégustation
de juin, la dernière de la saison. À l’origine, nous avions choisi le thème du
Libournais, ou de Bordeaux rive droite si vous préférez, avec en vedette les
vins de Saint-Émilion et de Pomerol. Mais nous avons vite revu nos plans avec les
chaleurs torrides du début de juin. Des gros rouges à 30 degrés centigrades?
Non merci. Du blanc? Pourquoi pas. Du Bourgogne? Ça ne déplait à personne. Avec
des crustacés en plus? Go Christian, hôte de la soirée, on marche, que dis-je
on court…
Nous sommes six, Theo et
Olivier ne pouvant être des nôtres. C’est amical les Oenopotes, pas trop sérieux
malgré la présence de plusieurs professionnels en sommellerie ou en cuisine, dont
les ardeurs cognitives sont tempérées par les amateurs intenses et passionnés,
plus ou moins formés (certains ont suivi des cours à l’ITHQ), qui composons la
moitié du groupe.
Alignés devant nous, dans nos
verres de dégustation, cinq beaux bourgognes aux couleurs lumineuses. Que c’est
beau les blancs. On voit plus les nuances. Les brillances et les couleurs sont
mises en valeur par la lumière. On devine l’âge ou la provenance selon l’intensité
et l’évolution du jaune vers les dorés profonds et les tuilés. La verdeur révèle
l’acidité, la jeunesse… Bref, c’est magnifique. Oui, je sais, c’est beau le
rouge aussi, et on peut tout aussi bien deviner plein de trucs en examinant les
couleurs et les densités, la brillance. Mais là on est avec les blancs et pas n’importe
lesquels.
Un Beaune 2002 ouvre la
marche, le Clos Saint-Désiré de Rodolphe Demougeot, rond, aux fruits intenses,
belle longueur en bouche et une jolie finale. On enchaine avec un Meursault de Rémi Jobard, le 1er
cru les Genevrières, jeune, très jeune en millésime 2009, frais, tendu, un peu
fermé, en finesse et qui promet formidablement. Il est déjà très beau après un
séjour dans le verre d’une vingtaine de minutes, mais nos experts vous diront
que les Rémi Jobard, il faut savoir les attendre longtemps. Désolé, on le boit tout
de même.
Au centre, le pivot de la dégustation,
un Puligny-Montrachet les « Enseignères » de la Maison Champy en
millésime 2005. Là on se trouve un peu plus dans la tradition des chardonnays
un peu boisés, plus ronds, plus beurrés, plus lourds aussi, avec du corps, des
épaules et une persistance gustative intéressante et longue.
Tiens, un autre Jobard suit,
celui d’Antoine, le petit cousin de Rémi, un
Meursault en 1er cru les Genevrières lui aussi, mais en millésime 2008.
Superbe, une plus grande maturité que l’autre, un peu plus intense et rond, avec
du fruit, de la finesse et une finale glorieuse. Trop jeune? Sans aucun doute,
mais tellement bon déjà, comme celui du cousin Rémi. Un autre Beaune vient
clore la séquence des vins, le Beaune Bressandes 2002 de Louis Jadot. Déjà en
maturation, un peu « oxydatif », au nez et en bouche, ce qui annonce le début
de son déclin. Une forte personnalité, un vin merveilleux avec le saumon et la
truite fumée de la Gaspésie du début du repas, mais qui s’accordait moins bien avec le homard finement grillé et laqué au Sauterne
que nous ont préparé Conrad et Simon.
Laqué au Sauterne? Pas le
premier venu d’ailleurs, un premier grand cru classé, le Château Rayne Vigneau
de 1999, une idée de Conrad qui l’a apporté. Nous avons tous gardé quelques
morceaux du homard pour déguster avec le Sauterne à la fin. Génial. Les Meursault
des cousins Jobard faisaient merveille avec le homard en prélude à la finale.
On s’est régalé mes amis et on se promet
de repartir, au mois d’août avec les rosés, et en septembre avec les rouges de la Côte de Beaune
en Bourgogne.