Marsala est une ville
paisible, à l’Ouest de l’île, où il y a peu de choses à signaler sinon que le
centre historique est presqu’entièrement fermé à la circulation, de façon
théorique bien entendu, car les citadins
le traversent avec leurs voitures, leur motos et leurs scooters comme si de
rien était, sans plus d’égards envers les piétons que dans le reste de la
Sicile.
C’est cool Marsala, plat
aussi, ça nous repose des montées vertigineuses des villages du sud, et le bord
de mer est pas mal. Il y a des salines superbes un peu au nord, à Ettore e
Infersa, sur la route qui mène à Trapani. C’est une ville de province où les
gens se couchent tôt. A 21h00, il n’y a plus que les touristes qui vont et
viennent à la recherche d’un restaurant.
Mais Marsala, c’est aussi la
ville du vin qui porte son nom, un vin qui a connu des hauts et des bas,
surtout des bas au cours des dernières décennies, et qui tente désespérément de
redorer son blason autrefois brillant. Ici, comme partout ailleurs en Sicile,
des vignerons artisans et quelques maisons travaillent d’arrache-pieds à
relever le niveau de qualité des vins. La Sicile est encore et toujours, la
plus grosse région productrice de vins de l’Italie et qui dit gros volume dit
souvent petits vins.
Les guides de voyage et des
amis nous recommandaient fortement de passer un bout de soirée à la Sirena
Ubriaca (la Sirène Ivre) l’Enoteca dont le patron est un passionné du marsala. Il
connait son affaire le Bello (le surnom qu’il se donne) et il boit sec. Dès
10h00 du mat il attaque le premier d’une longue série de verres de Marsala (18%
d’alcool) qui émaillent ses journées. En soirée, il est parfois chancelant et
son élocution mollit d’heure en heure.
C’est un pur et dur du
Marsala le Bello, il ne recommande que les petits producteurs comme son
fournisseur, Buffa, qui produit de forts bons vins. Il honnit les grosses
maisons comme Pellegrino, Florio, et même Marco de Bartoli, louangé à juste
titre par les spécialistes de l’Italie tel Jacques Orhon. Il fut même peiné que
nous visitions la Cantine Florio, la plus grande manufacture de marsala de la ville.
Mais il s’y connait en vins de Marsala.
Voici ce que j’en ai retenu.
Le marsala est un vin muté ou
fortifié, i.e. qu’on ajoute de l’alcool en cours de fermentation pour augmenter
la puissance du vin et/ou pour conserver du sucre et ainsi créer un vin doux.
Il peut être ambré, doré ou rouge selon les cépages qui en sont à l’origine ou
le type de macération et d’élevage. Il y a cinq grandes familles de marsala.
- Le Fine : vieillissement d’un an, 17% d’alcool, qui se fait en
sec, demi-sec
et en doux; doré, ambré ou rouge. C’est ce vin qui sert surtout à
la cuisine.
- Le Superiore : 2 ans de vieillissement, 18% d’alcool, sec,
demi-sec et
doux; doré, ambré ou rouge.
- Le Superiore Riserva : 4 ans de vieillissement minimum et 18%
d’alcool,
sec, demi sec ou doux; doré, ambré ou rouge.
- Le Vergine : 5 ans de vieillissement minimum, 18% d’alcool
minimum, qui
se produit seulement en sec et en doré et
ambré, jamais en rouge
- Le Vergine Riserva, vieillissement minimum de 10 ans, 18% minimum
d’alcool, en sec, doré et ambré seulement.
Les deux Vergine sont peu fortifiés et seulement avec de l’alcool de vin ou
de l’eau de vie pour atteindre le seuil de 18% d’alcool. On en trouve à 19% et à
20%.
Quatre cépages autochtones
sont à l’origine des marsalas ambrés et dorés : le grillo, le catarratto, l’inzolia et le damaschino.
Quatre cépages servent à
faire du rouge (rubino) : le
perricone, le nerello mascalese, le calabrese et le nero d’avola.
A la Sirena Ubriaca et
ailleurs j’ai pu gouter aux divers types et je dois dire que le Fine et le Superiore m’ont laissé passablement indifférent. J’ai apprécié le Superiore Riserva, demi-sec, moins de
100g de sucre par litre et le dolce à plus de 100g de sucre par litre ; des
arômes de dattes et de prunes presque confites, une bouche suave et sans
lourdeur, une belle longueur en finale. Mais ce sont surtout les deux Vergine qui m’ont plu, surtout le Riserva. Quel élan, quelle exubérance
aromatique et gustative. De la réglisse, des fruits confits (abricots, dates et
prunes), de la noix (léger oxydatif de l’élevage). Beaucoup d’équilibre, entre
la puissance et l’élégance. Un vin superbe. J’ai pu rapporter deux bouteilles du
producteur Buffa : un Superiore
Riserva doux de 5 ans et un Vergine Riserva.
Je les partagerai avec mes
deux groupes de dégustation à l’automne lorsqu’on explorera la Sicile.
En attendant, je boirai
d’autres bons vins de Sicile dont je vous parle prochainement.
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